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Interview classée X : Axel Abysse

by Steen

Partez à la rencontre de l’univers d’Axel Abysse, producteur, réalisateur et acteur français, installé à Tokyo.

À son arrivée au Japon, Axel Abysse devient mannequin et tourne en parallèle des vidéos pour des projets dans l’événementiel. À ce moment-là, une carrière dans l’industrie du porno ne lui vient pas du tout à l’esprit. Cependant, ses explorations photographiques érotiques, qu’il poste sur divers réseaux, reçoivent un accueil chaleureux en ligne. Agréablement surpris par les retours encourageants de centaines d’admirateurs sur Internet, il décide alors de partager ce qu’il appelle “sa malédiction” avec le monde entier. Abysse est né.

ARTICLE POUR PUBLIC AVERTI : cet article parle de la pratique du fistfucking et de sexe consenti.

Est-ce que c’est compliqué de faire des films porno au Japon ?

Axel Abysse

“Habiter au Japon est pour moi un choix purement personnel, qui n’a rien à voir avec ma carrière. La France ne me manque absolument pas, la culture japonaise m’intéresse. Mon mari a une carrière de Dragqueen florissante à Tokyo, son nom est Kosmic Sans…Mais effectivement, d’un point de vue professionnel, le fait d’être au Japon me rend les choses plus difficiles. Il y a notamment beaucoup de censure.

Pendant la pandémie ça a été très compliqué pour moi parce que je travaille beaucoup à l’étranger. Je passe la moitié de l’année au Japon, puis je voyage aux États-Unis et en Europe pour tourner avec un maximum de modèles différents. Avec la COVID-19, pendant deux ans je n’ai pas pu voyager du tout. Mais il faut voir le positif, grâce à cela, je me suis rapproché de plusieurs modèles japonais, dont Yoshi Kawasaki qui est l’un de mes meilleurs amis maintenant.

Ma production fonctionne bien, on sort de la pandémie, j’ai recommencé à voyager, je continue de filmer avec des Japonais… Avec des amis. Et j’ai même créé une soirée fétichiste à Tokyo nommée “Kink”,  donc j’ai quand même des perspectives intéressantes ici.”

Tu as donc ta propre boite de production ?

Axel Abysse

Je suis réalisateur et j’ai mon propre site porno auto-produit. Tout est hébergé aux États-Unis. Comme je vis au Japon, je tourne avec des Japonais et je dirais que 25% de mon public environ est japonais.

Avant ça, j’ai travaillé pour un studio de SM japonais très underground. J’ai détesté l’expérience ! On ne m’a absolument pas demandé quelles étaient mes limites avant le tournage, s’ il y avait des choses que je voulais faire et des choses que je ne voulais pas faire… du coup je n’ai fait qu’un seul tournage avec eux. Après, je tiens à préciser que cette mauvaise expérience avec ce studio japonais m’est propre. Je tourne avec beaucoup de modèles japonais qui eux travaillent régulièrement avec des studios et globalement j’en ai de bons échos. D’ailleurs je connais surtout les studios gay et pas vraiment les studios hétéros. 

Du coup, avec ma production, j’essaie de faire quelque chose d’un peu plus réel. Le sexe est réel évidemment, c’est pour ça que la conversation sur le consentement est toujours très importante avant de commencer.

Comment t’es-tu fait connaitre ?

Axel Abysse

Quand tu as ta propre boite de production, il est difficile de se distinguer et de faire le poids face aux gros studios. Il faut trouver des partenaires, d’autres acteurs légitimes, et gagner en influence petit à petit. Moi je me suis fait connaître grâce au fistfucking. C’est un fétiche de niche, mais ces 10 dernières années le fistfucking s’est beaucoup démocratisé dans la communauté gay.

J’ai fait une fac de cinéma à Paris et cela influence ma manière de faire du porno. Je fais toujours attention à ma manière de filmer. Je réfléchis à mon éclairage et à une ambiance avant même de penser au contenu sexuel. On me dit souvent que l’esthétique de mes films est assez différente ou même sophistiquée, parce qu’elle ne ressemble pas à ce que les gros studios produisent. Ça me fait très plaisir ! 

Je compare mes films à un clip musical. Je me concentre sur les pratiques et j’essaie de montrer ça de manière authentique, d’instaurer une ambiance plutôt que de dérouler un scénario “cliché”.

Photos : Kyaro – au Blue Eagle à Shinjuku

Pourquoi le fistfucking ?

Axel Abysse

C’est compliqué à expliquer. C’est une pratique qui donne énormément de plaisir. Quand je me fais fister, je vis plusieurs orgasmes sur une très courte période. Si je fais ça pendant 30 minutes, je peux avoir une dizaine d’orgasmes, donc je pense que j’ai de la chance avec mon corps.

Le système nerveux dans cette zone est très développé. Le fistfucking c’est un massage interne, donc pour les hommes qui ont une prostate c’est un massage directement de la prostate par l’intérieur !

Et puis c’est une pratique extrêmement intime parce que tu laisses une personne pénétrer ton corps, littéralement avec sa main ou son bras. Il y a là un rapport de confiance envers l’autre qui est, pour moi, au-delà de toute pratique sexuelle.

Comment travailles-tu au quotidien ?

Axel Abysse

Je cherche des modèles qui ont de l’expérience et je leur demande quelles sont leurs pratiques. On essaie de réfléchir à quelque chose qu’on a envie de faire ensemble. Je cherche des modèles qui me plaisent et j’essaie vraiment de respecter l’authenticité quand on filme. 

Par exemple, je vais demander au caméraman de filmer du début jusqu’à la fin. C’est moi qui ferais ensuite mon découpage de scènes au montage et qui vais sélectionner ce que je veux, un peu comme dans un documentaire. Du coup, pas besoin de tourner, de couper, puis de replacer la caméra ailleurs et de refaire la même chose sous un autre angle comme le font les studios américains. 

Par contre, ça me prend énormément de temps. Heureusement j’adore le montage ! Je préfère même le montage au tournage. C’est ma partie préférée dans la production. La promotion sur les réseaux sociaux aussi est très chronophage. Heureusement je ne suis pas tout seul. Mon site web est géré par une équipe aux États-Unis, donc je trouve des modèles, je trouve les caméramans, je réalise et je fais le montage, mais une fois que le film est fait, je l’envoie aux équipes là-bas et ils s’occupent de la suite.

Est-ce qu’il est difficile de lutter contre les gros studios ?

Axel Abysse

Quand tu es indépendant, tu es confronté à de nombreux problèmes. Je pense par exemple au vol de contenu : vol de tes photos, de tes vidéos qui sont ensuite diffusées contre ta volonté sur des sites gratuits. C’est beaucoup plus facile pour les gros studios de lutter contre ça. Ils ont des structures dédiées, avec les outils spécifiques, des équipes, etc.

Moi je mets des extraits de 5 minutes de mes vidéos sur des sites comme Pornhub. Mais 5 minutes dans un porno c’est très long en fait ! La personne qui regarde a le temps de jouir et elle n’a pas besoin de payer pour le contenu complet. Du coup certains créateurs sont contre le fait d’utiliser ces grosses plateformes de diffusion. Le problème c’est que si on n’est pas sur ces plateformes,  beaucoup de gens pensent que l’on a arrêté de faire du porno. C’est pareil avec nos réseaux sociaux.

Je me dis que quoi que je fasse, mes vidéos vont être volées au bout d’un moment. Du coup, mettre un extrait moi-même, avec un lien vers mon site, c’est une garantie que les gens cherchant mon nom ou mon contenu, vont tomber sur la vidéo que j’aurais mise en ligne moi-même et qu’ils pourront retrouver mon site. 

Quelles sont, selon toi, les responsabilités des créateurs de contenus sexuels ?

Axel Abysse

On a des responsabilités sur plein de sujets. À la fois sur l’inclusivité, sur le consentement, sur le fait que les très jeunes ont accès au porno… Je ne fais pas partie d’une association directement, par contre j’ai toujours été très vocal sur les réseaux sociaux sur le fait que je n’utilise pas de drogue par exemple. L’usage des drogues est très répandu dans ce milieu et c’est dramatique. J’ai perdu plusieurs connaissances à cause de l’usage de la drogue. Je ne me considère pas comme un activiste, mais effectivement ce genre de sujets me tiennent à cœur.

Il y a aussi un phénomène sur lequel le Japon est en retard, c’est l’éducation sur les pratiques sexuelles. Il y a beaucoup de jeunes Japonais qui ne sont absolument pas au courant que le VIH existe toujours. Pourtant maintenant on a des on a des solutions comme la PrEP.

Quand on a fait notre soirée Kink, on a ouvert l’évènement avec le show d’une Drag Queen, Labianna Joroe, qui a intégré dans son spectacle une conversation sur les pratiques sexuelles, sur le consentement et sur les différentes façons de se protéger.

Quels sont tes futurs projets ?

Axel Abysse

On veut refaire des soirées Kink à Tokyo ! Pour durer dans ce milieu,  il faut “innover”.

En tant qu’acteur dans le porno tu as une date de péremption de toute façon. Heureusement pour moi, dans le porno gay il y a une durabilité un peu plus longue que pour les femmes. Il y a beaucoup d’acteurs qui vont jusqu’à 50 ans, mais moi je me vois avant tout comme un réalisateur.

Pour l’instant je continue à tout faire, mais je pense que l’évolution naturelle des choses va être de me diriger plus vers la production et la réalisation. Je veux continuer à développer ma propre marque, mais de plus en plus derrière la caméra et mettre en avant d’autres talents !

🌶 Retrouvez le travail d’Axel Abysse sur son site 🔞 et sur ses réseaux. 🌶

Merci à lui d’avoir accepté de répondre à nos questions, ainsi qu’au bar Blue Eagle, à Shinjuku 2-Chome, pour avoir accepté d’être le décor de notre séance photo.

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